C
e concert illustrera trois aspects du romantisme allemand, avec un précurseur, Beethoven, un authentique, Schumann, et un épigone, Max Bruch.
Beethoven ouvrit la voie au romantisme par sa personnalité affirmée, qui l'amena à bouleverser les canons de la musique de son temps. Ses cinq concertos pour piano ont chacun, à cet égard, leur intérêt propre et montrent une évolution progressive et inexorable du classicisme vers le romantisme. Le Concerto n° 4 s’impose comme l’un des plus grands concertos de Beethoven. Il inaugure en effet un genre nouveau, étant à la fois symphonie pour orchestre et fantaisie pour piano.
Le Concerto pour violoncelle de Robert Schumann est une manière de rhapsodie d'un romantisme échevelé et, en même temps, l’un des sommets du répertoire consacré à cet instrument. Quant à la merveilleuse Romance pour alto et orchestre de Max Bruch, il s'agit d'une ballade romantique délicieusement enivrante, qui s’est taillée depuis longtemps une place de choix dans le répertoire
des altistes.
Orchestre Symphonique GRADUS AD MUSICAM
Direction
Aurélien Pouzet-Robert
Dimanche 5 février 2023 17h
Salle Poirel Nancy
Tarifs (hors frais de location) :
- 22 €
(1° catégorie: orchestre et 1er rang de balcon)
- 19 € (2° catégorie : balcon)
- 17 € (réduit* : toutes catégories)
- 6 €
(lycéens/étudiants jusqu'à 26 ans)
- gratuit en dessous de 16 ans
*Chômeurs et groupes + de 10 personnes
Billetterie à l'entrée du concert
Renseignements : Gradus Ad MusicamMél. : gam@gradus-ad-musicam.com Tél. : 03 83 21 09 19
Réservations : Salle PoirelMél. : poirel@nancy.fr Tél. : 03 83 32 31 25
Beethoven, Vienne 1806
B
ien que né à Bonn, en Rhénanie, en 1770, Ludwig van Beethoven est considéré par l'histoire comme un compositeur viennois, tant il fut attaché à Vienne, dont il s'est rarement éloigné après s'y être installé en 1792.
C'est en effet dans la capitale de l'empire des Habsbourg, haut lieu de la musique s'il en fut, qu'il compléta sa formation, auprès de Haydn en particulier, qu'il écrivit, joua et fit jouer ses œuvres, qu'il noua et entretint des amitiés parfois traversées d'orages. 1806 constitue pour le monde germanique une année particulièrement marquante. En effet, le 6 août 1806, l'empereur d'Autriche François Ier déclare renoncer à la fonction et la dignité d'empereur du Saint Empire Romain Germanique fondé par Otton Ier près de mille ans auparavant. Cette structure était devenue une coquille vide depuis que Napoléon Ier, fort de ses victoires militaires sur l'Autriche et ses alliés, avait, trois semaines auparavant, créé la Confédération du Rhin, protectorat français regroupant seize états allemands. Dès l'année suivante, une vingtaine de nouveaux états furent intégrés à la Confédération, y compris la Saxe et la Bavière.
L'armée napoléonienne avait brièvement occupé Vienne de novembre 1805 à janvier 1806. Or, il se trouve que Beethoven, l'occupation militaire ayant pris fin, et après avoir achevé son opéra Fidelio représenté en novembre 1805 et en mars 1806, se sent comme libéré et va dès lors connaître une période extraordinairement féconde : avant la fin de l'année 1806, il compose les trois quatuors dédiés au comte Razoumovsky, sa 4° symphonie, son concerto pour violon, et son 4° concerto pour piano.
Un peu plus tard, en 1808, ne parvenant pas à obtenir un poste officiel à Vienne, Beethoven avait décidé de quitter la ville. À la suite du fameux concert « historique » du 22 décembre 1808 au Theater an der Wien, avec au programme les créations de ses cinquième et sixième symphonies, ainsi que de son 4° concerto pour piano et de sa fantaisie chorale (!), des mécènes lui assurèrent une rente annuelle de 4000 florins pour lui permettre de demeurer dans la capitale.
Après la mort de Haydn en mai 1809, il ne se trouve désormais plus grand monde pour contester la place de Beethoven au pinacle des musiciens. On avait bien compris que, comme le dira plus tard Victor Hugo, « ce sourd entendait l’infini ».
BEETHOVEN Le concerto pour piano n° 4
L e 4° concerto pour piano en sol majeur, op. 58 est le quatrième des cinq concertos pour piano de Ludwig van Beethoven. Il fut composé en 1806, avec cependant des premières esquisses dès février 1804. Sa création est à peu près contemporaine de sa quatrième symphonie, de son concerto pour violon et de sa sonate Appassionata. Il fut exécuté seulement deux fois du vivant de Beethoven, d'abord en 1807, à titre privé, au palais du Prince Lobkowitz. Il fut créé en public lors d'un concert « historique » le 22 décembre 1808 au Theater an der Wien, avec au programme, outre cette pièce, les créations de sa cinquième et de sa sixième symphonie, ainsi que de sa fantaisie chorale. Le soliste en était le compositeur lui-même, déjà handicapé par sa surdité, laquelle était cependant encore partielle.
Il est dédié à l'archiduc Rodolphe d'Autriche, son élève & mécène, dédicataire également de son cinquième concerto.
Dès les premières notes, le 4° concerto pour piano surprend. Le pianiste intervient pendant cinq délicates mesures à découvert, alors que, d’habitude, son entrée est préparée par une longue introduction orchestrale.
D’une austère gravité, l’andante con moto offre des sonorités pré-impressionnistes où le piano et l’orchestre se voient traités en individualités distinctes. Dans ce mouvement lent, concentré, sans doute le plus intérieurement dramatique jamais conçu dans un concerto, Beethoven atteint un des sommets de son œuvre. Piano et orchestre y alternent dans un dialogue aux accents d’une gravité telle qu’aucun concerto n’en avait jusqu’alors fait entendre, et où les silences mêmes deviennent des signes tout aussi éloquents que les sons.
Comme dans le Concerto n°3, l’orchestre n’est donc plus réduit au rôle de simple accompagnateur. Les rapports entre orchestre et piano s’équilibrent et s'individualisent. Ils se confrontent, conversent dans un dialogue marqué par l’expressivité. La voie vers le concerto romantique est bel et bien dégagée.
Il n’y a qu’un Beethoven !
B
eethoven ne vit pas encore au temps du show-business et des droits d’auteur. Il est financièrement dépendant des éditeurs qu’il choisit et des aristocrates qui l’emploient, lui servent des rentes, lui paient ses dédicaces ou l’usage exclusif de ses œuvres. Le Prince Karl Lichnowski fut de ceux-là. En 1800, il avait accordé à Beethoven une rente annuelle de 600 florins (environ 13 000 euros), qui devait être versée jusqu'à ce que Beethoven obtienne un poste permanent de musicien - ce qui ne s'est jamais produit. Dans une lettre de 1805, le musicien le qualifie d'un de ses plus fidèles amis et principaux mécènes de son art. Les paiements de Lichnowsky prirent cependant fin à la suite d'une grave querelle, lorsque Beethoven fut invité au château de Grätz à l'automne 1806 et refusa obstinément de jouer de la musique pour les officiers de l’armée napoléonienne stationnés au château.
Comme Ferdinand Ries, un élève et ami, l'a raconté, Beethoven "avait déjà empoigné une chaise, et l'aurait fracassée sur la tête du prince après que celui-ci eut enfoncé la porte de la pièce que Beethoven refusait d'ouvrir, si Oppersdorf (un ami du prince) ne s'était pas interposé ".
A son retour à Vienne, loin de battre sa coulpe et de courber l'échine, Beethoven envoya à son mécène un billet fréquemment cité :« Prince, ce que vous êtes, vous l’êtes par le hasard de la naissance. Ce que je suis, je le suis par moi-même. Des princes, il y en a et il y en aura encore des milliers. Il n’y a qu’un Beethoven ». Et, littéralement furibard, Beethoven brisa dare-dare un buste du prince. Sacré loustic, ce Ludwig !
Cet événement est révélateur d'une évolution du statut de l'artiste musicien au début du XIX° siècle. Comme musiciens de cour, les compositeurs répondaient essentiellement à des commandes de divertissement. Beethoven, dans le sillage de Mozart abjurant la tutelle du prince-archevêque de Salzbourg, change la donne en refusant de plaire aux puissants et en donnant à certaines de ses œuvres une valeur de message.
En incarnant la figure de l’artiste libre, indépendant des pouvoirs temporels ou religieux, indocile, rebelle, solitaire, impétueux, conscient de son génie créateur, Beethoven bouscule les relations traditionnelles entre le compositeur et son protecteur, qui considérait celui-ci comme son serviteur ou pour le moins comme son obligé, et l'obséquiosité comme une vertu cardinale.
Beethoven,
virtuose et improvisateur génial
L
orsque le jeune Beethoven arrive à Vienne en 1792, il n’est pas encore célèbre. Ce n’est que deux ans plus tard qu’il connaît la gloire, après son premier concert public. Il est vite reconnu comme un génie, notamment grâce à ses improvisations, qui provoquent une émotion intense chez ses auditeurs.
Si quelques esprits chagrins critiquent le jeu de Beethoven, lui reprochant sa brutalité, la plupart ne tarissent pas d'éloges sur son génie ; c'est le cas de Carl Czerny, l'un de ses élèves, qui se souvient : « Son improvisation était on ne peut plus brillante et étonnante. En quelque société qu'il se trouvât, il parvenait à produire une telle impression sur chacun de ses auditeurs qu'il arrivait fréquemment que leurs yeux se mouillaient de larmes, et que certains éclataient en sanglots. Il y avait dans son expression quelque chose de merveilleux. Quand il avait terminé une improvisation de ce genre, il éclatait de rire et se moquait de l'émotion qu'il avait causée à ses auditeurs. "Vous êtes tous des fous" leur lançait-il, souvent même il se montrait offensé de ces marques de sympathie. "Qui peut vivre parmi des enfants aussi gâtés ?" » s'écriait-il.
A l’époque, à Vienne, l’un des divertissements en vogue parmi l’aristocratie viennoise était le concours d’improvisation. Un noble soutenait un pianiste virtuose, un deuxième en appuyait un autre. Dans le salon de l’un des deux aristocrates, les deux pianistes s’affrontaient, improvisant à tour de rôle. Le duel gagnait en intensité jusqu’à ce qu’un vainqueur fût déclaré. Dans ses premières années à Vienne, Beethoven fut contraint de concourir contre les meilleurs talents de la ville et les surclassa tous sans coup férir.
Le duel musical le plus connu eut lieu en 1800 contre un certain Steibelt (parrainé par le prince Lobkowitz), auquel Beethoven (soutenu par le prince Lichnowsky) infligea une cinglante humiliation, ayant improvisé de manière magistrale sur un thème en quatre notes de son adversaire après avoir posé une partition de celui-ci à l'envers sur le pupitre. Celui-ci était si furieux qu’il jura de ne plus mettre un pied à Vienne tant que Beethoven y demeurerait. Beethoven a habité à Vienne jusqu’à la fin de ses jours… et Steibelt tint parole. Quant à ses quatre notes, il paraît qu’elles sont passées à la postérité… ce seraient les premières notes de la symphonie Eroica !
Romantisme : à fond l'émotion
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tendhal, mélomane passionné, savait reconnaître la bonne musique : « la bonne musique ne se trompe pas, et va droit au fond de l'âme chercher le chagrin qui nous dévore au fond de l'âme et du cœur. »
L
a musique romantique est l'expression musicale dominante en Europe tout au long du XIX° siècle. Ce courant musical aux formes variées qui met au premier plan l'expression de l'émotion s'inscrit dans le mouvement esthétique européen du romantisme qui touche les arts et la littérature. Tout au long du XIX° siècle, la musique romantique conserva dans ses caractéristiques une certaine continuité, une homogénéité temporelle de style, que les autres formes artistiques du romantisme ne connurent pas. Au début du XIX° siècle, la musique commençait à s'émanciper : elle n'était désormais plus considérée comme un art mineur, œuvre d'artisans, mais devenait enfin une forme d'art à part entière. Par conséquent, ce qui caractérise la musique romantique est surtout l'individualité dans les styles. Cette époque incarne avant tout la liberté.
De nombreux compositeurs célèbres - Mendelssohn, Schumann, Berlioz, Chopin, Liszt, etc. - s'illustreront dans cette longue période, aussi bien dans la musique instrumentale et orchestrale que dans l'art lyrique et vocal. Le piano-forte, en remplaçant le clavecin, permet désormais d'exploiter de puissants contrastes de dynamique. De la même façon, l'orchestration devient de plus en plus audacieuse et élaborée, d'autant plus que certains instruments, comme le cor, sont modifiés par les facteurs d'instruments de manière à devenir plus maniables. Les sonorités inventées par les romantiques sont particulièrement colorées et évocatrices, par comparaison avec la période classique. À la jonction de ces deux courants se situe la puissante personnalité de Ludwig van Beethoven, dont les premières œuvres se rattachent à l'esthétique classique tandis que celles de sa maturité sont considérées comme le début du romantisme musical.
Trois figures essentielles du début du XIX° siècle sont les précurseurs des développements qui suivent, et deviennent de véritables modèles. Weber (1786-1826) chante dans ses opéras les ombres fantastiques et légendaires des forêts. Avec Beethoven (1770-1827) émerge l’artiste comme libre créateur dont l’œuvre est chargée d’une signification philosophique et historique. Dans ses lieder, Schubert (1797-1828) explore la complexité tragique des sentiments.
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Max Bruch romantique par défi
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omme son contemporain Johannes Brahms, Max Bruch (1838–1920) appartenait à une école de composition qui cherchait à élargir plutôt qu'à révolutionner les genres établis par Haydn, Mozart et Beethoven, comme le concerto (par exemple son très célèbre Concerto n° 1 en sol mineur pour violon et orchestre), la symphonie et la romance instrumentale. La romance instrumentale trouve son origine dans des ballades vocales évoquant des destins réels ou légendaires souvent victimes de déboires amoureux, et le genre a connu une grande popularité dans les écoles de violon et de violoncelle du XIX° siècle.
Les dernières œuvres de Bruch, à partir de 1910, sont celles d'un homme qui a vu mourir de nombreux amis musiciens et confrères interprètes de ses compositions : ces œuvres, aux proportions modestes, refusent la virtuosité, restant dans un chant mélodique intime d'une extrême douceur et sous forme de confidences, d'aspiration à la paix et comme tendant au silence.
La Romance pour alto et orchestre en Fa
majeur op. 85 fait partie de ces œuvres instrumentales que Bruch composa, entre 1909 et 1911, spécialement pour des interprètes qui, pour diverses raisons, lui étaient proches. Elle est dédiée à Maurice Vieux, premier altiste à l'orchestre de l'Opéra et du Conservatoire de Paris.
L'œuvre est indiquée Andante con moto, comme il sied à une romance. Cependant, au cours du morceau, l'alto évoque des ambiances variées, de plus en plus agitées, par l'utilisation de rythmes mixtes, de triolets et de notes pointées, une série d'arpèges rapides et d'accords abrupts, avec la tête du thème toujours reconnaissable tout au long du morceau, joué par l'un ou l'autre instrument, tandis que l'alto virevolte au-dessus. Puis les arpèges orageux et le trémolando cèdent progressivement la place à la lumière solaire lyrique.
Le principal regret de Bruch, compositeur prolifique, fut sans doute de n'avoir été presque uniquement connu que pour son fameux Concerto pour violon. Il mourut seul, isolé dans son rejet des modèles de Wagner et de Liszt. À la fin de sa vie, son inclination persistante pour la musique romantique de Mendelssohn et de Schumann et sa résistance au changement ont donné à ses ultimes compositions de grandes similitudes avec ce qu'il composait soixante ans plus tôt. Souvent perçu comme un compositeur passéiste, il n'est pas parvenu à atteindre la reconnaissance de son ami Johannes Brahms. En effet, au cours de sa longue existence, il a côtoyé les plus grands (Mahler, Liszt, Wagner, Bruckner, etc.) sans avoir pour autant modifié son style rigoureux, « gardant sa fidélité esthétique et académique » à la musique romantique d'autrefois.
Robert Schumann
romantique à la folie
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obert Schumann (1810-1856) composa son Concerto pour violoncelle en octobre 1850, immédiatement avant sa Symphonie « Rhénane ». Ce fut une période certes féconde, mais aussi cruelle, car ses hallucinations auditives se multipliaient, premiers symptômes du déclin qui conduira à son hospitalisation en 1854 et à son décès deux ans plus tard.
Son épouse, Clara, écrit dans son journal: « Ces voix lui disaient qu’il était un pécheur, et voulaient l’entraîner en enfer; son état aboutit à une véritable crise de nerfs, il criait de douleur, et les deux médecins qui, par bonheur, étaient venus tout de suite, pouvaient à peine le tenir.
Je n’oublierai jamais son regard, je souffrais avec lui les plus cruels tourments. Après une demi-heure environ, il se calma et dit que les voix amicales se faisaient de nouveau entendre, et lui rendaient courage. Les médecins le mirent au lit, et quelques heures passèrent ainsi, puis il se leva de nouveau et corrigea son Concerto pour violoncelle ; il espérait, par là, être délivré de l’incessant bruit des voix ».
Le Concerto pour violoncelle - que Schumann nomma d'abord « Concertstück » (Pièce de concert pour violoncelle avec accompagnement d’orchestre) - fut composé très rapidement, en quatorze jours, et achevé le 24 octobre 1850. Il ne fut publié que quatre années plus tard : Schumann attendit deux ans pour l’offrir à une maison d’édition, qui refusa l’œuvre puis, en vain, à un autre éditeur un an plus tard. Ce n’est que le troisième éditeur à qui Schumann proposa l’œuvre à la fin 1853, Breitkopf & Härtel, qui l’acceptera finalement.L'œuvre ne fut jamais jouée en public de son vivant, certainement parce qu'elle était de conception trop inhabituelle pour l'époque.
Ce Concerto pour violoncelle n’a rien à voir avec l’ardeur frémissante du Concerto pour piano composé en 1841. Les trois mouvements s’enchaînent, dans l’urgence de retrouver une impossible unité. L’œuvre, d’une conception étrange, ne fait aucune concession à la virtuosité. Page poignante où tout est beau mais où rien ne brille : le soliste y chante avec un chagrin obstiné devant un orchestre aux couleurs sombres.
Clara note que le morceau composée par son mari l’a été pendant une phase de créativité euphorique, « écrite de la manière la plus adaptée au caractère du violoncelle ». Dans son journal du 11 octobre 1851, elle écrit encore : « Le romantisme, l’esprit, la fraîcheur, l’humour, puis l’entrelacement fascinant du violoncelle et de l’orchestre, tout cela est vraiment passionnant. Et puis, l’harmonie et un sentiment profond remplissent les passages chantants! ».
Source :
https://notrehistoire.ch/entries/lyYKjlLwWnw
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Concert du Nouvel An 2023
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Joseph HAYDN
LA CREATION
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’est à partir de 1796, au sommet de son art et de sa renommée internationale, que Haydn composa La Création.
Exaltant la création de l’univers selon les récits bibliques, cette page magistrale est considérée comme le grand chef-d’œuvre de Haydn. A plus de soixante-cinq ans, le père fondateur de la sonate, bâtisseur du classicisme viennois et créateur d’un monumental catalogue de symphonies et quatuors à cordes, s’appliqua à inscrire sa marque au genre oratorio que Haendel avait porté à son plus haut niveau, et composa cet hymne au créateur. Ce fut un immense succès, qui le poussera, trois ans plus tard, à composer Les Saisons, son ultime oratorio, qui connut lui aussi un accueil triomphal.
Haydn prend exemple sur les grands oratorios londoniens de Haendel pour nous livrer une extraordinaire «partition animée» où l'on entend rugir les lions, bondir les cerfs, paître les bœufs et les moutons dans les prés, les oiseaux gazouiller dans les cieux, les insectes bourdonner dans les airs et les serpents siffler sur la terre.
Trois anges, incarnés par trois solistes, narrent et commentent les six jours de la Création selon la Bible. Le chœur en liesse exalte la fin de chaque journée et l'orchestre illustre avec allégresse les épisodes successifs de la genèse du monde : l'apparition du soleil, la création des animaux, et d'abord, en ouverture de l'oratorio, la fameuse représentation du chaos originel.
Dimanche 15 janvier 2023 à 16h Centre culturel Remiremont
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Joseph HAYDN & GRADUS AD MUSICAM Des affinités fort électives
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OSEPH HAYDN, UN GENIE TROP BIEN LOTI ? Haydn n'eut pas l'heur d'affronter les tracas et les vicissitudes d'un sort hostile. Au contraire, la bienveillante Providence lui prodigua ses bienfaits sans compter. Il ne put émouvoir la postérité par une mort prématurée comme Mozart & Schubert ou par une tragique infirmité comme Beethoven. Il ne finit même pas son existence dans les affres d'un ultime requiem. "Papa Haydn", comme l'appelait Mozart, donne l'impression d'avoir accompli son destin de musicien sans verser le tribut des larmes et des déchirures imposé à nombre d'artistes. De fait, la Fortune lui sourit de toutes ses dents, et il vécut 77 ans. Il mit à profit cette longue vie pour composer une œuvre prolifique et protéiforme.
Il mena une vie de château, fut porté aux nues par ses pairs, il eut pour disciple Mozart & Beethoven, il fut fêté à Londres et à Vienne comme le plus grand compositeur de son temps, il créa la symphonie, composa 84 quatuors, 14 messes, 3 oratorios, des opéras, des concertos, et 106 symphonies. L'hymne national allemand, le Deutschlandlied, est une mélodie composée par Haydn, bien que l'Allemagne ne fût pas encore un état constitué à son époque. La musique lui coulait des doigts comme l'eau d'une fontaine et la source ne s'en tarit qu'à son trépas. C'est ainsi que Haydn, l'un des grands génies de la musique, a fait le meilleur usage des bienfaits que lui prodigua la Providence.
GRADUS AD MUSICAM a souvent interprété Haydn, notamment ses symphonies et son oratorio le plus célèbre, La Création. Il a en effet avec Haydn, un touche-à-tout pétri de joie de vivre, des affinités électives.
Joseph HAYDN (1732-1809)
N é en 1732 dans une famille modeste de douze enfants, Joseph HAYDN n'était pas destiné à devenir musicien. Cependant, son père, charron, adorait la musique. Dès huit ans, remarqué en raison de sa belle voix de soprano, il devint enfant de chœur à la maîtrise de la cathédrale Saint-Étienne de Vienne, où il demeura jusqu’à l’âge de dix-huit ans.
Après quelques années de vaches maigres passées à courir le cachet, Joseph Haydn tira le gros lot : en 1753, il fut engagé comme secrétaire de Nicola Porpora, professeur de chant et compositeur renommé, qui lui enseigna la composition et l'introduisit dans les milieux aristocratiques.
En 1757, Haydn accéda au poste envié de « Kapellmeister » (maître de chapelle, c'est-à-dire directeur musical), du Comte Morzin puis, en 1761, du Prince Esterházy, au service duquel il resta une trentaine d'années. Il disposait au château d’un orchestre de musiciens de qualité et de bons chanteurs. La famille Esterházy était l'une des plus riches et les plus influentes de l'Empire des Habsbourg.
Durant ces années, Haydn composa un nombre considérable de symphonies, quatuors à cordes, concertos, sonates pour clavier, opéras, divertissements et musique sacrée.
Après la mort du Prince en 1790, Haydn voyage à Londres et mesure l'ampleur de sa célébrité. Il y compose ses douze dernières symphonies.
A son retour à Vienne, il crée, à plus de 65 ans, deux œuvres majeures : les oratorios La Création (1798) et Les Saisons (1801), empreints de la candeur rousseauiste caractéristique du siècle des Lumières.
Haydn fait partie de la “trilogie classique viennoise” avec Mozart et Beethoven ; il est l'une des figures essentielles de la musique de cette époque .
Première de La Création : Haydn fait un tabac
A lors que la foule se presse au Burgtheater en cet après-midi de mars 1799 pour entendre la première audition publique de La Création, le nouvel oratorio de Haydn, on voit les troupes du tsar Paul Ier traverser Vienne pour rejoindre l'Italie et y combattre les armées françaises du Directoire. C'est que pour la deuxième coalition qui s'oppose à la France révolutionnaire, l'Autriche des Habsbourg s'est alliée avec les Russes. Voilà de quoi inquiéter la société viennoise, qui pourtant, oublie ses préoccupations pour se rendre au théâtre.
"Le célèbre Haydn a exécuté sa ‘’Création du monde’’, écrit un témoin, et je ne puis te dire à quel point c'était plein. Jamais aucun théâtre, depuis qu'il en existe, n'a réuni tant de monde. J'étais à la porte dès une heure, et c'est au risque de perdre la vie et d'avoir les membres brisés que j'ai pu dénicher un tout petit siège au dernier rang du 4ème étage. (…) Avant le début de l'oratorio, il y avait un tel bruit qu'on ne pouvait s'entendre penser. On criait : Aïe ! Mon bras ! Mon pied ! Mon chapeau ! Les dames appelaient les domestiques envoyés en avant réserver des places, et les domestiques appelaient leurs maîtresses, et les gens s'entassaient les uns sur les autres, de sorte qu'on entendait les fichus, les châles et les chemises se déchirer de partout. Enfin la musique a commencé, et d'un seul coup, tout est devenu si tranquille que vous-même, mon cousin, auriez pu entendre trotter une petite souris, et si on n'avait pas applaudi si souvent, vous auriez pu croire que le théâtre était vide."
Un diplomate suédois, ami de Haydn, raconte l'effet qu'avait déjà fait ce passage lors de la première audition privée de l'oratorio : "Personne n'avait vu la page de la partition dépeignant la naissance de la lumière. C'était le seul endroit de son travail que Haydn avait tenu caché. Je crois voir encore son visage au moment où ce trait sortit de l'orchestre. Haydn avait la mine de quelqu'un prêt à se mordre les lèvres, soit pour réprimer sa confusion, soit pour dissimuler un secret. Et à l'instant précis où pour la première fois cette lumière éclata, tout se passa comme si ses rayons avaient été lancés des yeux brûlants de l'artiste. La réaction des Viennois, électrisés, fut telle que pendant quelques minutes l'orchestre ne put continuer."
A lire et écouter : Musicopolis
OPERA & ORATORIO,
frères jumeaux
C omme son nom l’indique, l’oratorio est une invention de membres de l’ordre religieux italien des Oratoriens, au XVI° siècle. À cette époque, il était interdit aux compositeurs d’opéra de tirer l’argument de leur œuvre d’un sujet sacré. Le but des créateurs de l’oratorio était de contourner cette interdiction en créant une forme spécifique qui pût aborder ce type de sujets tout en présentant le même potentiel de séduction que l’opéra. C’est à l’initiative de Saint Philippe Néri lui-même, fondateur de l’ordre, que le genre fut créé, et c’est dans la Chiesa Nuova à Rome (cf. ci-dessus) qu’eut lieu la toute première représentation d’oratorio avec la création de La Rappresentazione di Anima e di Corpo d’Emilio de Cavalieri en février 1600.
De fait, toute l’histoire de l’oratorio jusqu’à nos jours montre que le genre restera tributaire de cette relation peu tranchée avec la musique profane : on verra par exemple Haendel utiliser exactement les mêmes airs dans un opéra profane et dans un oratorio à sujet sacré. De même, Bach a largement utilisé ses œuvres profanes pour ses compositions religieuses. Il n' y a donc pas à déplorer que Bach n'ait pas écrit d'opéras : il a écrit les plus beaux oratorios qui soient, ses Passions selon Saint Jean et selon Saint Matthieu ainsi que l'Oratorio de Noël.
Quant à Haendel, il écrivit environ 25 oratorios, dont bon nombre de chefs-d'œuvre comme Le Messie, mais aussi une quarantaine d'opéras.
HAYDN, quant à lui, n'en composa que deux : La Création & Les Saisons, mais ceux-là n'ont jamais cessé d'enthousiasmer les musiciens et les mélomanes. Plus tard, Mendelssohn vint s'inscrire dans cette lignée avec Paulus & Elias, mais le genre tomba tout de même en désuétude au XIX° siècle. Toutefois, au début du XX° siècle, l’oratorio connut un certain renouveau sous une forme plus ou moins traditionnelle, notamment sous l'impulsion d'Arthur Honegger, dont l'oratorio Le Roi David obtint un vif succès en 1924.
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