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  Pierre CHOLLEY
& GRADUS AD MUSICAM

DE PROFUNDIS

C

ette œuvre a été composée entre 1992 et 1994. Elle est dédiée à ma mère. Pourquoi un De profundis plutôt qu'un Requiem ? A la lecture du Psaume 129, il m'est apparu que la pieuse idée de profondeur concentrait en elle plus de force et de questionnement.

En effet, même si ce texte latin ne constitue ni un thème, ni un programme musical, il m'a semblé qu'il pouvait offrir - outre l'aspect religieux - une autre lecture.

Une question fondamentale traverse la partition : "  Pourquoi avoir été créé pour disparaître un jour ?  ". C'est une question, bien sûr, qui n'a que le silence pour réponse et la foi comme chemin. Les sous-titres marquent des étapes sur ce chemin; ils symbolisent différentes attitudes de l'Homme face à la Mort.

L'Homme se croit immortel. Sa propre mort est vécue comme une trahison et un abandon. Eclate alors sa colère. C'est le début fortissimo dans l'œuvre. Le tempo s'apaise et c'est le temps de l'imploration.

Dans le second mouvement, les "tractations", apparaît, au milieu des atermoiements du chœur, la mezzo suppliante.

Le chœur est absent du troisième mouvement. L'Homme, resté seul, médite. Au fond de sa nuit, deux voix se répondent incarnées par la soprano et la mezzo.

Le chœur attaque en force le quatrième mouvement délibérément tonal et optimiste. Pour un temps, la Vie reprend ses droits. La soprano incarne le refus de se soumettre et l'étourdissement. Et si la Mort n'existait pas ?

Le cinquième mouvement est une longue incantation chantée par la soprano sur la note pivot la bémol, reprise par la mezzo, puis en écho par les chœurs jusqu'à l'apothéose.

C'est là le véritable Requiem qui se calme progressivement en reprenant l'incantation initiale transfigurée par la note sol dièse, chantée par la soprano.

Le temps est aboli. Commence l'Eternité.

 

Pierre CHOLLEY

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Pierre CHOLLEY

P

ierre CHOLLEY est né en 1962. Il suit des études musicales au Conservatoire de Nancy, entre 1977 et 1983, dans les classes d'orgue et d'écriture et, parallèlement, des cours de composition de musique de film à l'Ecole Normale de Musique de Paris où il obtient le premier diplôme supérieur à l'unanimité dans cette catégorie.

Autodidacte avant tout, il revendique son chemin de compositeur indépendant en dehors de toute chapelle, ainsi que le mélange des genres. Entre de longues œuvres "mûries et digérées", il écrit souvent pour le théâtre une musique gaie et dynamique d'où surgit le mouvement. Cette expérience de la scène imprègne sa musique d'une sensualité qui parle directement au corps et porte littéralement les chanteurs et choristes. Sans doute peut-on dire que Pierre CHOLLEY s'inscrit dans une tradition dont les principaux représentants furent, avant lui, Francis Poulenc et Jean Françaix.

Le Chant des Rouleaux est un oratorio pour chœurs, solistes, récitant et formation orchestrale d'après des poèmes de déportés. Comme dans son De Profundis, cette œuvre ne s'attarde pas sur la mort et la souffrance ; ce qui intéresse le compositeur, c'est la force poétique qui se dégage des mots.

Sa formation d'organiste lui donne le goût des architectures sonores solides, des orchestrations chatoyantes. C'est une musique riche en mélodie, forte dans son discours intérieur et pleine de vitalité, une musique qui chante et qui donne à chanter.

Ajoutons que Pierre CHOLLEY fut résident, en 1996, au château de Lourmarin et lauréat, en 1994, de l'Académie des Beaux-Arts, prix Jacques Durand de composition.

Pierre CHOLLEY est pianiste accompagnateur et professeur de Jazz au Conservatoire de Meaux. En tant que compositeur, il est édité aux Editions du Chant du Monde. 

C.V. détaillé de Pierre Cholley


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Le chant des rouleaux 

1. Le manuscrit de Zalman Gradowski :

(Extrait de "Les Voix dans la nuit" de Ber Mark)

En novembre 1942, les juifs de Suwalki (Pologne) furent concentrés dans le camp de Kielbazin, près de Grodno, d'où ils furent déportés, un mois plus tard, à Auschwitz. C'est alors que Zalman Gradowski arriva à Birkenau. Sur l'une des premières pages fripées de son bloc-notes, il donne des détails sur sa famille déportée en même temps que lui.

Parmi les groupes de déportés juifs occupés dans les différents "Kommandos" de travail, il y en avait un qui était maudit : le Sonderkommando, constitué exclusivement de détenus juifs préposés aux fours crématoires. Gradowski appartenait au Kommando du crématoire 3.

Le groupe de résistants du Sonderkommando rendit d'héroïques services : il passait aux internés du camp des médicaments, de la nourriture et de l'argent ; il subventionnait le Mouvement Général de Résistance ; il expédiait à l'extérieur des documents pour alerter le monde en faisant connaître les atrocités commises par les nazis, surtout celles de Birkenau.

Il incita également ses membres à écrire leurs mémoires et à tenir un journal pour enregistrer au jour le jour les événements du temps, puis à enterrer ces documents que nous appelons désormais « Les Rouleaux d'Auschwitz ».

Les manuscrits de Zalman Gradowski furent les premiers à être déterrés, le 5 mars 1945, un mois et demi après la libération d'Auschwitz par les troupes soviétiques. La commission spéciale d'Etat de recherche sur les crimes nazis, procédant aux premières fouilles dans les fosses remplies de cendres sur l'aire du crématoire 2, trouva une gamelle d'aluminium, de type allemand, dans laquelle on recensa un carnet de notes et une lettre, tous deux rédigés en yiddish et signés Zalman Gradowski.

2. Les poèmes :

Ces poèmes retrouvés dans les baraquements des camps, glissés dans les interstices des planchers et des murs sont les véritables archives de ces hommes et de ces femmes qui écrivaient au nez de leurs bourreaux et au péril de leur vie.
"Chercheur, fouille partout sur chaque parcelle de terrain : Des documents, les miens et ceux d'autres personnes y sont enfouis qui jettent une lumière crue sur ce qui s'est passé ici. " dit Zalman Gradowski.
Ces hommes et ces femmes croyaient en la valeur du témoignage, leur façon de résister aux bourreaux était de combattre contre l'oubli : "II faut que les hommes sachent et se souviennent, il le faut, il faut que les générations futures soient informées. " 
Au milieu de l'enfer des camps ils ont trouvé la force de réciter des prières, de songer à l'amitié et à l'amour, d'écrire de merveilleux poèmes.
Les poèmes mis en musique par Pierre CHOLLEY :

Robert Desnos (Teresina)

Le Dernier Poème

chœur et orchestre

Franz Heckem (Dachau-Buchenwald)

Saisons à Buchenwald

chœur et orchestre

Giselle Guillemot (Fresnes)

A ma mère

chœur de femmes et orchestre

Ferdinand Reumann (Buchenwald)

La nuit

mezzo-soprano, chœur et orchestre

François Vernet (Dachau)

Fresnes

baryton, chœur et orchestre

Paul Goyard (Buchenwald)

Dessin

chœur et orchestre

Anonyme

Berceuse des enfants d'Europe

mezzo-soprano, chœur et orchestre

Yves Darriet (Buchenwald)

Berges

baryton, chœur et orchestre

 

Icône

Interlude pour clarinette et accordéon

Nicolas Youkof Vaptzarov (Bulgarie)

Poème d'Adieu

baryton et orchestre

 

L'Aigle d'Acier

orchestre

Edith Thomas (Buchenwald)

Prière

mezzo-soprano, baryton, trompette solo, chœur et orchestre

Jacques Grober

Chanson Yiddish

chœur et orchestre

3. L'œuvre vue par Pierre Cholley :

« C'est un texte sacré. J'ai été saisi à sa lecture par son lyrisme et, contrairement à toute attente, par sa force et sa beauté. C'est un texte qui vous prend à la gorge car il est le témoignage direct des souffrances inimaginables de ces hommes et femmes, mais aussi parce que c'est une réflexion terriblement lucide jusqu'à la dernière minute sur l'aliénation mentale que provoquait pareil enfer sur les êtres. On sent Gradowski vivre et respirer dans ces écrits ; puis le texte s'interrompt brutalement...

Il m'a semblé qu'on ne pouvait pas, de par la teneur et la prose de ce texte, le mettre en musique. C'est pourquoi j'ai choisi de le faire dire par un récitant qui incarne Gradowski et auquel on peut s'identifier.

Pour la partie musicale, en revanche, j'ai décidé de mettre en musique de magnifiques poèmes de déportés. Ces poèmes, souvent oniriques, scintillants d'espoir et de beauté, créent un rythme, une respiration en regard de la brutalité du texte de Gradowski.

Je ne me suis jamais posé la question du langage musical. Il est clair que pareille littérature ne peut qu'inspirer le respect et que toute démarche purement intellectuelle me semblait déplacée. Ces poèmes jetés sur des morceaux de papier - au nez des nazis et au péril de leurs auteurs - forcent l'admiration.

Ainsi, me laissant guider - je dirai presque "choisir" - par les poèmes eux-mêmes, je me suis laissé aller à ma veine musicale naturellement chantante et mélodique. J'ai préféré un discours musical clair et lisible. Ma musique, comme dans mes œuvres précédentes mais plus encore ici, est sensible, parfois empreinte de sensualité mais toujours avec beaucoup de retenue.

J'assume pleinement, en outre, l'émotion qui la sous-tend. Je n'ai eu qu'une obsession durant ces quatre années : ne pas trahir la fragile beauté de ces voix toujours vivantes qui nous parlent directement au cœur.

Pendant mon travail, j'ai beaucoup songé à toutes ces cultures si différentes qui se sont croisées dans ces camps. En parlant d'Auschwitz, Charlotte Delbo disait : " C'est la plus grande gare du monde ". Tous les peuples d'Europe s'y sont croisés c'est pourquoi j'ai nourri ma musique de nombreuses influences. J'ai introduit par exemple, un accordéon qui nous donne des teintes d'Europe Centrale.

J'ai tenu le pari que cette œuvre ne serait pas morbide. Au contraire, tout comme l'ont fait ces poètes, je me suis attaché à la vie. C'est en quoi c'est une œuvre sacrée car elle relie femmes et hommes d'hier, d'aujourd'hui et de demain, à ce même fil. J'ai choisi de terminer l'œuvre d'une façon quasi rituelle par une prière : longue sonnerie solennelle de trompette unissant tous les interprètes de cet oratorio dans un même recueillement. »


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